KAZAKHSTAN Les grèves ouvrières se multiplient
Au Kazakhstan (la plus grande et la plus industrialisée des anciennes républiques soviétiques d’Asie centrale), on assiste ces derniers mois à une multiplication de grèves, tant dans les multinationales étrangères que dans les entreprises d’oligarques locaux.

Par exemple, en décembre 2020, les machinistes de l’entreprise de transports KM Tranco ont cessé le travail, 300 d’entre eux se rassemblant devant la direction, qui, dès le 12 décembre, était contrainte de céder un treizième mois de salaire et une augmentation de 45 %. Il est possible que l’approche des élections législatives explique ce recul, car l’entreprise appartient à un membre de la famille Nazarbaev (au pouvoir depuis la chute de l’Union soviétique en 1991– ndlr). Le 27 décembre, les ouvriers du pétrole de l’entreprise chinoise CNPC, dans la région de KyzylOrda, se sont adressés à leur directeur, au président de la République et à la Fédération des syndicats (ex-syndicats officiels toujours inféodés au régime actuel – ndlr), pour demander une augmentation de 100 % de leur salaire. Ils ont eux aussi obtenu satisfaction.
Le 6 janvier, environ 300 travailleurs de la multinationale italienne Bonatti S.p.A (hydrocarbures) de Karachaganak, à l’ouest du pays, se sont mis en grève et en grève de la faim pour une augmentation de 50%, car leur salaire actuel (150 000 tengué, 300 euros) ne leur permet pas de vivre. Même revendication, le 12janvier, des mineurs de la mine d’or « Youbilieïny » d’Aktobé, qui appartient au groupe kazakh Altynex. Le 15 janvier, les travailleurs de l’entreprise pétrolière chinoise Si Bou, dans la région de Mangistau, ont défini leurs revendications en assemblée générale: augmentation du salaire à 20 000 tengués (400 euros), augmentation des primes, etc. Les 16 et 17 janvier, la grève a commencé. Le 19, les grévistes ont dû reprendre le travail à cause des menaces d’arrestation du procureur, du KNB (nom du KGB depuis 1991 – ndlr) et de la police. Bien que n’ayant pas obtenu satisfaction, la grève a donné un nouveau souffle à la lutte de classe dans la région. Le 26 janvier, les ouvriers du pétrole de la société chinoise KMK Mounaï entraient en mouvement, arrachant des augmentations de salaire, puis, le 26 janvier, ils étaient suivis par leurs collègues d’AMK Mounaï (capital sud-coréen), puis, le 1er février, par les travailleurs de MounaïSpetsSnab de la ville de Janaozen, où, le 16 décembre 2011, la police avait assassiné quinze ouvriers du pétrole grévistes.
Ces grèves inquiètent en haut lieu: le 5 février, le président Tokaev a demandé au milliardaire britannique Lakshmi Mittal de « minimiser l’incidence des accidents du travail et d’éliminer l’inégalité des salaires entre employés étrangers et employés locaux »… pour tenter de prévenir de nouveaux débrayages, débrayages qui ne se limitent pas au secteur industriel. Ils touchent aussi les transports en commun et les hôpitaux. Le 4 février dernier à Alma-Ata, l’ancienne capitale du pays, les personnels du Samu étaient en grève contre la remise en cause de leur prime covid. Les syndicats officiels n’ont soutenu aucune de ces grèves et les syndicats indépendants subissent la répression des autorités (le syndicat indépendant du secteur des hydrocarbures a ainsi été démantelé au début de l’année 2021 par les autorités). Alors, de nombreuses grèves émanent de groupes d’ouvriers. Dans le cours de ces grèves, la vieille revendication de nationalisation des entreprises privatisées, qui avait surgi lors de la grande lutte des travailleurs du pétrole en 2011, a refait surface.
D’après une correspondance du Kazakhstan