URGENT

INDE Le gouvernement Modi est responsable des pogroms anti-musulmans (correspondance de Nambiath Vasudevan)


Hindous et musulmans de Delhi protestent ensemble contre les agressions de milices du BJP : « Arrêt de la violence ! » ; « Arrêtez de diviser l’Inde ! » ; « Boycott de la CAA et de la NRC ! »

Le premier ministre de l’Inde, Narendra Modi, avait préparé une magnifique réception à 150 millions de dollars US à l’intention du président des États Unis et de sa famille à Ahmedabad (Etat du Gujarat) dont, jusqu’en 2014, Modi avait été ministre d’État en chef.

La diaspora indienne aux États Unis compte quatre millions de personnes dont une grande partie est originaire du Gujarat. Lors des élections de novembre 2020 aux États-Unis, le vote des Indiens peut jouer un rôle. Traditionnellement, les Indiens aux USA soutiennent le Parti Démocrate. Il était de coutume auparavant que le gouvernement indien n’affiche aucune préférence pour un parti ou un candidat lors des élections aux Etats Unis.

Cela a changé lorsque, lors de sa récente visite à Houston, Modi, s’adressant à une nombreuse assistance d’Indiens, a lancé un slogan électoral en faveur de Trump : « Ab Ki Baar Trump Sarkar » (Cette fois-ci, il faut un gouvernement Trump). À propos de la visite de Trump en Inde, l’éditorialiste du Indian Express écrit : « Ce qui sous-tend toutes ces politesses c’est qu’ils reconnaissent qu’ils peuvent mutuellement s’épauler pour leur avenir politique. Trump envisage sa réélection en Novembre et voudrait bien que son attitude chaleureuse à l’égard de Modi se solde par un soutien précieux de la part de la communauté Indienne aux Etats Unis. Quant à Trump, lui aussi peut s’avérer un soutien politique pour un Modi soumis à d’intenses critiques au niveau international pour les décisions prises par son gouvernement au Cachemire et pour l’amendement à la loi sur la citoyenneté. » En l’espace de 36 heures, Modi a neuf fois serré Trump dans ses bras et tous deux ont plusieurs fois chanté leurs louanges respectives.

Mis à part la question des prochaines élections, la visite de Trump a assuré à l’Inde un partenariat stratégique. Un accord à 3 milliards de dollars a été conclu permettant à l’Inde d’acquérir des hélicoptères militaires Apache et MH-60 Romeo auprès des États-Unis, assorti d’une assurance d’aboutir à la conclusion d’un accord bilatéral de libre-échange après les élections aux Etats Unis. Selon le Economic Times : «Ce qui ressort surtout de la visite du Président Trump c’est que les États-Unis continuent à accorder une grande importance au rôle que joue l’Inde comme contrepoids à la Chine dans la région Indo-Pacifique».

La déclaration commune indique que les dirigeants sont impatients de conclure rapidement un accord de coopération militaire et que compte tenu de l’initiative Nouvelle Route de la Soie chinoise, il faut mettre l’accent sur le projet de développement d’infrastructures – (Blue Dot Network), initiative conjointe s’adressant à de multiples partenaires, gouvernement, secteur privé et société civile pour promouvoir un développement d’infrastructures globales, fiables et de haute qualité 

Lorsque, quittant le Gujarat (Ahmedabad), Trump rejoignait la capitale de l’Inde, Delhi, des affrontements armés se déroulaient dans certains quartiers de Delhi entre sympathisants et opposants à la loi de Modi sur la citoyenneté. Cela faisait plusieurs jours que des bandes pro CAA (Amendement à la loi sur la citoyenneté) arpentaient les rues de Delhi sans aucun empêchement exigeant qu’on mette fin aux manifestations contre le CAA. Les combats de rue qui ont commencé le 23 ont fait 22 morts et 150 blessés, des maisons, des magasins et des salles d’exposition ont été vandalisés. Les journalistes n’ont pas été épargnés. La police de Dehli, directement sous les ordres du gouvernement Modi, n’a pas levé le petit doigt alors que les bandes se déchainaient, causaient un carnage où des personnes innocentes ont perdu la vie. Les quartiers où se sont déroulés ces événements sont maintenant soumis au couvre-feu, patrouillés par des forces paramilitaires puisque la police de Delhi n’a pas réussi à maintenir l’ordre. Ordre a été donné de tirer sans sommation. La situation à Delhi est tendue.

Le BJP (1) fait de la question de la citoyenneté un moyen d’instaurer la division entre hindous et musulmans. Dès le vote de la loi le 5 décembre, la violence était dans l’air. À partir du 15 décembre, de graves incidents ont eu lieu à Delhi. Des incidents majeurs ont opposé les étudiants et la police aux portes du campus de l’université Jama-Milia Islamiya. Les forces de police ont envahi la bibliothèque de l’université Jamia tirant sur des étudiants en train d’étudier dans les livres. Beaucoup ont été blessés. Un peu plus tard, ce sont des nervis qui ont envahi le campus de l’université Jawaharlal Nehru et s’en sont pris aux étudiants dont certains ont été grièvement blessés. Curieusement, dans ce cas, lorsque les nervis ont attaqué les étudiants, la police a refusé d’intervenir. Dans ces deux universités de Delhi, les étudiants protestaient contre la loi sur la citoyenneté. À ce jour, il n’y a pas eu d’enquête ni d’arrestation.

En février, le BJP devait faire face à une épreuve cruciale lors des élections à l’assemblée législative du territoire de Delhi. Dans ce territoire national, le BJP n’est plus au pouvoir depuis plus de 20 ans et veut le regagner. Il lance ses accusations contre le parti dirigeant le AAP, Am, Aadmi Parti (Parti des gens ordinaires) de soutenir les manifestants de Shaheen Baug (2). Des nervis sympathisants du BJP, brandissant des armes à feu sont sortis dans les rues menaçant de tirer sur les manifestants anti-CAA. Le 11 février, le BJP a subi une défaite humiliante à Delhi. Sur les 70 membres qui constituent l’Assemblée d’État du territoire de Delhi, le AAP a obtenu 62 sièges et le BJP n’a pu en recueillir que 8. Cette défaite a également irrité le BJP, participant des violences inter-communautaires qui ont lieu à Delhi.

La visite de Trump en Inde s’est terminée par une conférence de presse le 25 février. Au cours de cette conférence de presse, une question a été posée à Trump à propos des affrontements intercommunautaires à Delhi et lors des manifestations contre la loi sur la citoyenneté dans toute l’Inde. Il a répondu que le Premier ministre Modi lui avait dit qu’en Inde il y a la liberté de culte. Le Président Trump a ajouté qu’il ne ferait pas de commentaire sur la loi sur la citoyenneté. À propos du Cachemire, il a répété sa proposition de médiation si l’Inde et la Pakistan lui en faisaient tous les deux la demande. À de nombreuses reprises, il a remercié le Pakistan pour son rôle positif dans l’accord de paix récemment passé entre les États-Unis et les Talibans. ■

Nambiath Vasudevan