BRÉSIL 45 millions en grève générale
Pas moins de 45 millions de travailleurs et de jeunes étaient en grève, le 14 juin, dans tout le Brésil, tandis que des manifestations massives ont eu lieu dans près de 380 villes pour le retrait de la réforme des retraites (« Prêvidencia ») et pour l’annulation de la baisse de 30 % du budget de l’enseignement public que le gouvernement d’extrême droite Bolsonaro Mourao veut imposer.

La profondeur de la révolte ouvrière avait imposé l’appel uni de toutes les confédérations syndicales à la grève pour le retrait de la réforme des retraites, qui n’est rien d’autre que la mise en œuvre des plans du Fonds monétaire international et l’obéissance aux exigences des marchés financiers. La veille, le gouvernement avait tenté une manœuvre en présentant au Congrès (Parlement) une version à peine édulcorée de la contre-réforme du ministre Paulo Guedes. Cela n’a diminué en rien la détermination des travailleurs et de la jeunesse, amenant Wagner Freitas, le secrétaire de la Centrale unique des travailleurs (CUT), à déclarer que ces amendements « ne changeaient rien ».
Le caractère massif de la grève s’est exprimé par l’arrêt complet des transports et de nombreux secteurs de l’économie.
Ainsi, certaines usines de « l’ABC » – la périphérie industrielle de Sao Paulo – étaient en grève à 98 %. La jeunesse étudiante et les enseignants, mobilisés avec leurs organisations les 15 et 30 mai derniers contre la baisse brutale du budget de l’enseignement public, ont fait la jonction avec les travailleurs dans la grève générale.
Dans toutes les manifestations, l’exigence de retrait de la réforme de la Prêvidencia côtoyait le mot d’ordre « Fora Bolsonaro ! » (Dehors Bolsonaro !), tandis que des milliers de manifestants brandissaient des portraits de Lula. Le 10 juin, le magazine d’investigation américain The Intercept a publié des documents confidentiels qui prouvent que c’est pour empêcher Lula de représenter le Parti des travailleurs du Brésil (PT) à l’élection présidentielle d’octobre 2018 que l’appareil judiciaire et policier corrompu l’a fait condamner et l’a jeté en prison en avril 2018. « Ils ont fraudé les élections… bas les pattes devant nos retraites ! », titrait le journal Resistir paru la veille de la grève.
La grève générale du 14 juin au Brésil est un événement majeur de la lutte des classes internationale. Elle rappelle que la classe ouvrière brésilienne, après la « défaite sans combat » qu’elle a subie lors de l’élection présidentielle d’octobre 2018, qui a vu la victoire de Bolsonaro, est en train de reprendre l’initiative.
La puissance de sa mobilisation a déjà imposé des mots d’ordre précis : le retrait des mesures anti-ouvrières et anti-jeunes et des segments d’unité avec les organisations. Elle exprime aussi la nécessité d’en finir avec Bolsonaro et son gouvernement. Un gouvernement ultra-minoritaire et arrivé au pouvoir par la fraude, en s’appuyant sur les institutions corrompues héritées de la dictature militaire (1964-1985)* et subordonnées à Washington. Au Brésil aussi, cela met à l’ordre du jour la perspective de l’Assemblée constituante souveraine pour balayer ces institutions et rétablir la souveraineté.
Correspondants
* Des institutions qui n’ont jamais été démantelées, y compris lorsque le PT était au pouvoir de 2003 à 2016.