Les campus se lèvent contre « Genocide Joe »
Reportage à l’université Columbia (New York)
de notre correspondant Alan Benjamin, responsable de Socialist Organizer*
Un vaste mouvement embrase les campus. Étudiants et enseignants se mobilisent contre
« Genocide Joe » (Biden) et exigent l’arrêt de toute aide militaire et financière des États-Unis
à Israël. Du jamais-vu depuis la guerre du Vietnam.
Les manifestations massives contre le génocide à Gaza ont gagné les campus. Les étudiants ont installé des camps de tentes, organisent des forums, des débats. Au départ, la mobilisation avait une part importante de spontané. L’idée, c’était : « On va s’organiser nous-mêmes par en bas. Nous décidons nousmêmes. » Évidemment, comme dans chaque mouvement étudiant, et en l’absence d’un authentique syndicat étudiant, il y a aussi des tentatives de différents groupes de décider à la place des étudiants.
À l’université Columbia (New York), où tout a démarré, les étudiants ont organisé leur campement. La présidente de l’université a fait appel à la police qui est entrée sur le campus et a arrêté 106 étudiants. Cette répression a eu un effet « boule de neige » : des campements « Pour la Palestine » sont apparus dans des dizaines d’universités. L’administration des universités subit une pression énorme de Biden pour renvoyer étudiants et enseignants qui osent participer à ces discussions démocratiques. Mais les tentatives des médias et de la police de présenter ces rassemblements comme « antisémites » ont largement échoué, tout simplement parce qu’un très grand nombre d’étudiants, qui revendiquent leurs origines juives, y participent. Difficile d’expliquer que ces gens-là sont des antisémites !
Dans plusieurs universités, des étudiants et aussi des enseignants ont été suspendus pour avoir participé à ces meetings ou parce qu’ils ont pris position pour que l’administration américaine cesse de détourner des milliards de dollars de fonds publics pour l’envoi d’armement en Israël. « Suspendus », cela veut dire qu’ils doivent quitter l’université, mais c’est ensuite un conseil de discipline qui décidera s’ils sont renvoyés.
Mais à Columbia, par exemple, les trois quarts des enseignants ont pris position en soutien aux étudiants et ont fait une déclaration publique, une conférence de presse. Et les syndicats d’enseignants les soutiennent… Le 23 avril, des centaines d’enseignants se sont rassemblés sur le campus avec des pancartes : « Bas les pattes devant nos étudiants ! » ; « Arrêtez les suspensions d’étudiants maintenant ! » ; « Rétablissez l’autonomie universitaire ! », etc. La direction de l’université est très embêtée : comment renvoyer des étudiants dans ces conditions ?
Socialist Organizer est partie prenante de cette mobilisation. Nous mettons en avant les mots d’ordre de « levée de l’embargo », d’« arrêt du génocide » et d’« arrêt de toute aide militaire et économique à l’État d’Israël », mais aussi à l’Ukraine et, de fait, contre la Chine parce que c’est une même guerre impérialiste que Biden alimente.
Propos recueillis le 24 avril par Camille Adoue
* L’organisation qui, aux États-Unis, se réclame de la IVe Internationale.
300 étudiants arrêtés
Le 24 avril, une grande manifestation de milliers d’étudiants a été convoquée contre le vote au Sénat sur l’attribution de 95 milliards de dollars d’aide militaire à Israël, à l’Ukraine et à Taïwan. Trois cents étudiants ont été arrêtés. Pourtant, on sait qu’au sein même de l’administration Biden, certains disent ouvertement, en substance : « Ces gens, en Israël, nous conduisent à des guerres que nous ne voulons pas mener, car nous avons d’autres ennemis plus importants : Poutine et la Chine. »
Le mouvement syndical
Les dirigeants nationaux du mouvement syndical ne prennent pas part à ce mouvement. Sous la pression de nombreux syndiqués, certains dirigeants avaient supplié Biden pour qu’il se prononce pour un cessez-lefeu (ces mêmes dirigeants appellent à voter pour Biden). En cette année électorale, le Parti démocrate, qui se présente frauduleusement comme un « ami du mouvement ouvrier », a passé un accord avec les directions syndicales pour qu’elles se taisent. Pourtant, la bagarre au sein des syndicats continue.
Le spectre de 1968
Et maintenant ? De nombreux journalistes ont fait le parallèle entre ce mouvement et les gigantesques mobilisations des étudiants de 1968 contre la guerre du Vietnam. En 1968, des dizaines de milliers de jeunes contre la guerre avaient assiégé la convention présidentielle du Parti démocrate à Chicago (le démocrate Lyndon Johnson était alors président). La convention démocrate 2024 aura aussi lieu à Chicago… Est-ce que cela sera Chicago 1968-bis ?
Alan Benjamin
