URGENT

Le comité de suivi de la conférence de Mumbai s’est réuni

Le comité de suivi de la conférence de Mumbai s’est réuni.

Nos correspondants le savent : en 2019, des militants de 52 pays avaient lancé un appel à la tenue d’une nouvelle conférence mondiale contre la guerre et l’exploitation, pour l’Internationale ouvrière. 

La pandémie et les restrictions de circulation qui en découlent ont retardé la convocation d’une telle conférence. 

C’est pour discuter de la situation des travailleurs à l’échelle internationale et des perspectives du combat pour l’Internationale ouvrière que le comité de suivi de la conférence de Mumbai s’est réuni le 16 septembre. L’occasion de confronter l’expérience des combats ouvriers sur différents continents. 

Nous publions de larges extraits des contributions apportées par des militants d’Inde, des États-Unis, d’Azanie/Afrique du Sud et de France. 

Nous reviendrons ensuite sur les décisions prises concernant la convocation de la conférence mondiale. 

Inde 

« La formidable mobilisation des paysans depuis neuf mois » 

Nambiath Vasudevan (Inde) a tenu à souligner que « depuis un an et demi la pandémie de Covid-19 a considérablement aggravé la crise et les inégalités. Cette pandémie a montré l’incapacité du système capitaliste à protéger les peuples. Toutes ces tragédies auraient pu être évitées si les systèmes de santé avaient été préservés, si les personnels hospitaliers avaient été recrutés en nombre, si l’oxygène indispensable pour sauver des vies avait été disponible… C’est la négligence criminelle des classes dirigeantes qui a conduit à la perte de millions de vies humaines et leur cortège de souffrances. Dans de nombreux pays – par exemple en Asie – les populations attendent toujours la première dose de vaccination. » 

Dans tous les pays, affirme-t-il, « guerre et exploitation sont étroitement reliées. En Inde, 50 000 soldats sont postés à la frontière chinoise et le gouvernement procède à 

une augmentation du budget militaire au détriment du reste. Les relations tendues entre l’Inde et le Pakistan risquent de s’aggraver encore, tandis que le gouvernement réactionnaire de l’Inde se rapproche de l’Australie dans le dispositif des États-Unis contre la Chine. » 

Cependant, il faut noter dans ce contexte extrêmement difficile « la formidable mobilisation des paysans pour l’abrogation des trois lois anti-paysannes qui prétendent livrer l’agriculture aux grandes multinationales. Mais les paysans résistent et ne renoncent pas depuis neuf mois. Le 27 septembre dans toute l’Inde, les organisations paysannes appellent à la mobilisation les paysans, les ouvriers, la jeunesse contre le gouvernement et contre tous les aspects de sa politique : lois anti-paysannes, lois contre le Code du travail, plan de privatisation des chemins de fer, des banques et assurances, etc. » 

États-Unis 

« Arracher les travailleurs à l’emprise du Parti démocrate » 

Des États-Unis, Nnamdi Lumumba (de l’organisation noire Ujima Peoples Progress Party) et Alan Benjamin (de Socialist Organizer) approuvent la perspective « d’une initiative qui permette de donner un cadre commun face à l’offensive mondiale de la classe capitaliste ». 

Nnamdi Lumumba rappelle que son organisation est « un produit du mouvement de libération nationale des Noirs des ÉtatsUnis. Un mouvement de libération qui tire ses racines de siècles de domination subie par les Noirs en Amérique, de l’esclavage aux lois Jim Crow (les lois instaurant la ségrégation), de la discrimination au combat pour les droits civiques. La situation faite aux Noirs aux États-Unis a alimenté notre compréhension de la nature du capitalisme et de l’impérialisme américain. Ces dernières années, nous avons travaillé pour regrouper la classe ouvrière américaine, notamment en combattant pour arracher les travailleurs à l’emprise du Parti démocrate, parce que le système politique est monopolisé par deux grands partis, le Parti républicain et le Parti démocrate, tous deux représentant le même système capitaliste. » 

« Je viens de Baltimore (État du Maryland), ajoute Nnamdi Lumumba. Ces dernières années, nous avons combattu notamment pour que justice soit rendue à Freddie Gray (1). Ce combat a contribué à radicaliser toute une génération de jeunes Noirs, de jeunes ouvriers. C’est pourquoi notre parti veut aider la classe ouvrière, aider les Noirs à rompre avec les démocrates, y compris en présentant nos propres candidats aux élections. C’est aussi dans cette perspective que nous faisons une éducation politique à destination de nos membres, pour leur expliquer ce qu’est le capitalisme, ce qu’est le combat pour le socialisme. Et c’est pour cette raison que nous soutenons la perspective d’une conférence mondiale, dont nous voulons être une composante, apprendre les leçons de ce qui se passe dans les autres pays. » 

(1) Freddie Gray, un jeune Noir de 25 ans, a été assassiné le 12 avril 2015 à Baltimore par des policiers qui lui ont refusé des soins après l’avoir grièvement blessé. Il est décédé une semaine après son arrestation des suites de ses blessures, dont des cervicales brisées et la trachée écrasée. Cinq ans avant l’assassinat de George Floyd à Minneapolis, sa mort avait provoqué d’importantes manifestations à Baltimore. Le procureur avait fini par reconnaître que la police avait commis un homicide. 

Azanie/Afrique du Sud 

« Depuis 2012, les veuves des mineurs assassinés à Marikana n’ont pas baissé les bras » 

Pour Mandlenkosi ka Phangwa (Azanie/Afrique du Sud), « la situation internationale justifie plus que jamais d’offrir aux travailleurs, aux jeunes et aux militants ouvriers un cadre commun de combat. La situation est extrêmement difficile. La pandémie a exposé au grand jour l’impasse du système capitalisme : en Europe, mais aussi en Afrique, où la pandémie a creusé encore plus les inégalités. Les dernières statistiques gouvernementales indiquent elles-mêmes que le taux de chômage en Afrique du Sud a atteint le niveau record de 80 %, essentiellement dans la jeunesse. Le gouvernement de l’ANC a promis aux chômeurs un revenu minimum d’environ l’équivalent de 20 euros par mois, ce qui ne permet pas de vivre. » 

Il attire enfin l’attention du combat mené par les veuves des mineurs de Marikana(2) qui, « depuis le massacre de leurs époux en 2012, n’ont jamais bénéficié de quelque compensation que ce soit. Il y a quelques jours, elles étaient réunies avec le syndicat AMCU à Johannesburg pour exiger la justice. Ces femmes n’ont jamais baissé les bras depuis le massacre de 2012, et elles ont besoin du soutien du mouvement ouvrier international », conclut-il. D’où l’importance de l’initiative lancée par Rubina Jamil (All Pakistan Trade Union Federation) et Christel Keiser (POID, France), qui a été depuis soutenue par plus de 300 militantes de 32 pays, pour la tenue d’une conférence internationale des femmes travailleuses à la veille de la conférence mondiale contre la guerre et l’exploitation. 

(2) À Marikana (nord de l’Afrique du Sud) en août 2012, les mineurs noirs et leur syndicat AMCU sont en grève pour un salaire de 12 500 rands (ils en gagnent environ 4 000). Le 16 août, le gouvernement ANC-Parti communiste ordonne à la police de tirer sur les mineurs en grève. Trente-cinq mineurs en grève sont assassinés. Le président actuel de l’Afrique du Sud, Cyril Ramaphosa (ANC), ancien syndicaliste mineur de la COSATU, était à l’époque actionnaire de la multinationale Lonmin et il a été prouvé depuis que la police est intervenue à sa demande. 

France

« La pandémie est mise à profit par tous les gouvernements » 

Daniel Gluckstein (France) affirme pour sa part : « Dans tous nos pays, nous vivons depuis deux ans une situation où la pandémie est mise à profit par tous les gouvernements pour franchir un cran dans leurs attaques contre la classe ouvrière et la démocratie. 

Alors il faudra bien dresser, ensemble à l’échelle internationale, l’acte d’accusation contre les multinationales, contre la classe capitaliste et contre les gouvernements qui utilisent la pandémie pour justifier la destruction en masse de larges secteurs de l’industrie, la destruction de pans entiers des services publics de la santé, de l’instruction, les privatisations et la remise en cause des droits syndicaux et démocratiques. 

La pandémie est une occasion qu’a saisie la classe capitaliste. Les capitalistes ont toujours su saisir chaque opportunité pour porter leurs coups contre les travailleurs. 

La classe ouvrière a un point de vue pratique : elle sait que la pandémie existe, que ce n’est pas une invention. Des millions de travailleurs dans le monde sont morts du Covid. Ils ne sont pas morts seulement de la pandémie. Ils sont morts de la pandémie et de l’absence de moyens déployés par les gouvernements pour combattre la pandémie. Ils sont morts de l’énorme retard sur les recherches sur le vaccin, de l’énorme retard pris dans la vaccination, de l’absence de vaccins dans des pays entiers. Ils sont morts du refus délibéré de lever les brevets sur les vaccins permettant leur distribution gratuite. Ils sont morts de l’absence de lits, de services, de personnels, d’oxygène dans les hôpitaux. Morts de la volonté délibérée des gouvernements de servir les intérêts capitalistes et pas ceux de la population et des travailleurs. Les travailleurs ne sont pas dupes et dans le monde entier revendiquent des services publics de santé… qui leur sont refusés. Il nous faudra, ensemble et à l’échelle internationale, dresser ce bilan, cet acte d’accusation contre le système capitaliste. 

Cela ramène à cette autre question soulevée par différents camarades. La question indiquée par les camarades des États-Unis, évoquant le refus des dirigeants du mouvement syndical de rompre avec le Parti démocrate et, de ce fait, de soutenir Biden. Ces problèmes sont posés dans tous les pays. Dans mon pays, en France, le gouvernement Macron, qui se livre à des attaques de manière incroyable contre les hôpitaux, l’école, aux licenciements, ne pourrait pas le faire si, dans les faits, les directions du mouvement ouvrier ne le laissaient pas faire. Il s’agit donc, pour nous, tout à la fois d’établir ce qu’est la situation des travailleurs, mais aussi d’aider à reconstruire de véritables représentations politiques ouvrières indépendantes et d’affirmer la nécessité d’une Internationale ouvrière pour rassembler ces combats. » 

En savoir plus sur International Workers Committee - Comité ouvrier international - Comité obrero internacional

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Continue reading